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Le Clos des Capucins

Lieu historique et architectural passionnant, le Clos des Capucins et son parc occupe plus de 5 hectares dans le Haut-Meylan.

Le château du Cizerin : 1666 – 1756

Au début du dix-septième siècle, le clos des Capucins s'appelait le château du Cizerin. Il était alors possédé par François du Faure, président du Parlement de Grenoble depuis 1594. Dans les années 1620, il devient intendant du Languedoc. Sa fille Justine hérite des biens considérables de son père dont le château de Cizerin à Meylan. Elle épouse le 5 février 1640 le conseiller François Guérin, seigneur de Tencin. Ils eurent trois enfants : François, sénateur au Sénat de Chambéry, Louise et Antoine. Ce dernier fut le père de la fameuse Madame de Tencin, mère naturelle du philosophe d'Alembert.

Le 3 février 1666, Justine du Faure se sépare du château et le vend pour douze mille livres à Gaspard Guigou de Chapollay. Celui-ci est président du bureau des finances du Dauphiné. Le 24 juin 1670, il fonde dans cette maison une chapelle sous le vocable de Notre-Dame de la Purification. Il la bâtit pour y faire célébrer la messe, la fête de l'Assomption de la sainte Vierge. A sa mort en 1681, le château passe à sa femme et à son fils Louis. Louis décède en 1714.

Ce n'est qu'au décès de sa mère que s'effectue le partage. Ses sœurs Louise de Gumin d'Hautefort et Françoise de Ricol en héritent. Puis la propriété passe dans les mains de la famille de Gumin d'Hautefort. A la mort sans postérité d'Antoine d'Hautefort, c'est un cousin éloigné Hyacinthe Meffray de Césarges qui en hérite en 1756.

Vers 1777, François de Meffray de Césarges achète le château du Cizerin. C'est un riche propriétaire qui possède déjà le château de Césarges près de Maubec et celui d'Hautefort près de Voiron. Son fils Achille de Meffray hérite du château en 1811 à la mort de son père. Il vend le clos aux Capucins en 1855.

L'acquisition de la propriété : 11 octobre 1855

Dans la première partie du dix-neuvième siècle, les Capucins étaient bien implantés en Savoie, à Chambéry, Annecy et Montmélian. Ils sont contraints de partir de la Savoie car le gouvernement sarde, régissant la Savoie, mène une politique de persécution contre les ordres religieux. Le gouvernement promulgue le 29 mai 1855 un décret, la loi Rattazi, appelée loi d'incamération ; elle supprime les communautés religieuses avec confiscation de leurs biens.

Le 25 juillet 1855, les Capucins de Chambéry sont expulsés de Savoie. C'est le Père Ambroise qui est chargé de rechercher en France un nouveau couvent. Après des investigations infructueuses pour trouver un endroit convenable, il découvre à Meylan "un vieux manoir à vendre". Après avoir hésité car le domaine lui paraît trop grand, mais faute de mieux et pressé par les circonstances, il décide de son acquisition. Une fois toutes les autorisations religieuses obtenues, il signe l'achat de la propriété devant un notaire de Noyarey, maître Rajon, le 11 octobre 1855 pour 57 000 francs or.

Le Clos des capucins : 1856 - 1868

Les Capucins vont transformer le château en couvent appelé dès lors le Clos des Capucins. A leur arrivée, le château était en mauvais état. La charpente et la toiture du bâtiment principal sont refaites. Des fenêtres sont aménagées.

Dès 1856, le Père Ambroise commence la construction de l'église. De style gothique, elle est l'œuvre de Théodore Fivel, architecte mauriennais, auquel on doit de nombreuses églises. Son financement est assuré par la Grande Chartreuse. La première pierre est posée le 10 mai 1857. Inaugurée et bénite par le Père Ambroise le 2 août 1859, l'église est consacrée par l'évêque à la Vierge Immaculée le 17 septembre 1864. La pierre du maître-autel est d'un seul bloc. Elle provient des carrières de l'Echaillon et se trouve maintenant dans la chapelle Don Bosco. Les chapelles latérales sont pourvues de statues et de niches d'autels en bois adaptées au style.

En 1858, on construit un étage supplémentaire avec quinze cellules sur ce qui s'appelait l'orangerie. Le couvent devient le plus grand couvent de province avec trente-deux cellules. Devant l'affluence des religieux en provenance d'Italie, on va devoir construire une nouvelle aile. Grâce à un don, deux salles d'étude, vingt cellules, un atelier et un jardin d'hiver sont entrepris. En 1867, on déplace la belle fontaine de pierre qui se trouvait primitivement à l'entrée pour la mettre dans la nouvelle cour d'honneur. Tous les travaux sont achevés en août 1868.

La vie quotidienne au Couvent : 1856 - 1880

La vie est rythmée par la prière, l'étude, les travaux de la vie quotidienne et les prédications dans les paroisses. A chaque Capucin du couvent est assignée une fonction : portier, tailleur, linger, vigneron, jardinier, cuisinier, ...

Un des capucins, le Frère Bernard, un Italien originaire de Lorette, ayant passé quatorze ans au Chili, était chargé de la culture de la vigne, qu'il taillait avec une technique particulière. Dix ans après la plantation, les Capucins jouissaient d'une charmante promenade formée de 2.400 ceps, qui leur produisaient 240 hectolitres de vin soit 10 litres par cep !

L'expulsion : 4 novembre 1880

Vers 1878, la grande évolution vers l'école laïque et gratuite avait déclenché une querelle contre les congrégations. Le président du Conseil, Freycinet, prit un décret le 29 mars 1880 donnant un délai de trois mois aux associations non autorisées pour obtenir l'approbation de leur statut.

En septembre 1880, Jules Ferry, alors président du Conseil, appliqua le décret : 261 couvents furent fermés et 5.643 religieux expulsés. A Grenoble, le préfet, Léonce Ribert, républicain libéral, classé comme "franc-maçon zélé" fit appliquer strictement le décret : le 4 novembre 1880, une compagnie d'une quinzaine d'agents de police se présente à la porte du Clos. Mais treize capucins et une dizaine de Meylanais s'y sont barricadés, ils refusent d'ouvrir.

Une foule estimée à deux cents personnes entoure le couvent. L'expulsion va durer toute la journée. Il faudra enfoncer quatorze portes et expulser manu militari huit Capucins. Des insultes seront échangées. Quatre actions judiciaires seront engagées. Les scellés seront apposés. Les Capucins retourneront en Italie près de Turin.

Le 1er octobre 1881, ils vont vendre au Marquis de Monteynard les bâtiments pour éviter la saisie. Ils partirent ensuite s'établir dans les missions au Liban et au Brésil.

En 1887, quelques Capucins revinrent à Meylan et y menèrent une vie très discrète jusqu'en 1903. Huit jours avant l'expulsion de la Grande Chartreuse (29 avril 1903), un juge de paix vint apposer des scellés sur le couvent des Capucins. Les derniers occupants étaient partis la veille.

La période du Séminaire : 1906 - 1925

En décembre 1906, après les inventaires et la confiscation des biens du clergé, le grand Séminaire de Grenoble va s'installer dans les bâtiments inoccupés des Capucins. Le déménagement a lieu mi-décembre dans le froid et la neige. Et on n'avait pas prévu une installation si rapide ; il eut fallu faire un minimum de réparations. Dans les chambres, le thermomètre descend à -22°C à la fin de décembre. Il faut venir à la cuisine pour se réchauffer.

Des aménagements durent être faits et la rentrée des 69 élèves eut lieu le 18 février 1907.

Durant la guerre, les bâtiments sont réquisitionnés et servent d'hôpital militaire. On y installa jusqu'à soixante-dix lits. Il fut dirigé bénévolement par Marc Giroud et animé par Mme et Mlles Giroud, Mme Victor Pagès, Mme Lescot comme infirmières.

Quarante-sept séminaristes de Meylan sont mobilisés durant la guerre de 1914. Quinze d'entre eux sont morts pour la France. Après la guerre, le séminaire reprendra son activité. L'inauguration du grand Séminaire, chemin de la Carronnerie, en octobre 1925, libère les bâtiments et permet le retour des Capucins.

Le départ des Capucins : 1972

Après la seconde guerre mondiale, la Communauté se réduit en nombre. Devenu trop grand pour eux, les sept derniers Capucins quittent le couvent en 1972 pour s'installer à Bouquéron sur la commune de Corenc. Ils ont quitté Corenc en 2004 pour Annecy.

Après quelques discussions au Conseil municipal, la ville de Meylan a acheté le couvent en 1976, pour plus de deux millions de francs en s'engageant à respecter les lieux en souvenir des Pères Capucins.

Depuis cette date, les bâtiments abritent différentes associations et accueillent des centres aérés. La ville a replanté des pieds de vigne et conservé l'ancien pressoir des Capucins. 

Zoom sur le petit cimetière

En 1857, le Révérend Père Ambroise obtient l'autorisation de créer un petit cimetière. Situé à l'est du jardin potager, il est clos de murs en 1874. La croix de pierre est donnée par l'abbé Biron, curé de Sassenage et bénite par le Révérend Père Edmond, définiteur et gardien du couvent.

Dans le petit cimetière reposent 38 religieux dont quelques religieux décédés à Chambéry. Vingt-cinq inscriptions ont été apposées. Sur chaque plaque, le religieux est connu sous un prénom (qui n'est pas celui de sa naissance, mais celui qu'il porte en religion) suivi du lieu de sa naissance.

On ne commença à apposer les petites plaques blanches de marbre qu'après le retour de 1925. Auparavant, seules trois grandes plaques de pierre avaient été posées pour les membres marquants de l'ordre : Bernardin de Thônes, Ambroise d'Ugine, Alphonse de Rumilly.

Le Frère Maximilien fut le dernier religieux à y être enterré (24 janvier 1972).

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